Malala Yousafzai (1997 – ) – L’éducation des filles au Pakistan

Ecrit par Valentine Delon

Mercredi, 11 Novembre 2015 10:43

L’Histoire prouve qu’il faut parfois attendre que l’espèce humaine soit victime et témoin des pires violences pour agir. La Seconde Guerre mondiale, théâtre de multiples violations des droits fondamentaux  de l’Homme, a été l’élément catalyseur dans la mobilisation de la communauté internationale.  Au lendemain de la Guerre, et face aux nouveaux défis posés par la mondialisation, les dirigeants des grandes puissances se réunissent pour promettre. Promettre de tout mettre en œuvre pour protéger les droits fondamentaux de l’être humain quelle que soit son origine ethnique, sa nationalité, son sexe, sa religion, sa couleur ou sa langue. Le principe de l’universalité des droits de l’homme est ainsi le pilier sur lequel reposent les textes normatifs internationaux.
Parmi ces droits, celui de l’accès à l’éducation est incontestablement l’un des plus importants. Condorcet affirmait dans son ouvrage Les Cinq mémoires sur l’instruction publique publié en 1791 que « L’inégalité d’instruction est une des principales sources de tyrannie. »  Lutter en faveur de l’éducation de l’enfant, c’est lui permettre d’être armé et de se défendre face aux inégalités et aux injustices. C’est également un moyen de mettre fin aux abus et à l’exploitation grâce à de meilleures perspectives d’emploi.  L’éducation n’est donc pas une fin en soi, mais la promesse de l’amélioration des conditions de vie et du progrès social. Elle est la pierre angulaire de l’économie d’un pays et a fortiori de la paix et de la sécurité internationales. La multiplication des traités internationaux au XXe siècle proclamant ce droit illustre bien la prise de conscience de son importance par la société civile et internationale.  Dès lors l’éducation est devenue une priorité et un combat de tous les jours. Dès 1945, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) fondée pour assurer cette mission l’affirme dans le préambule de son acte constitutif. Ainsi, « les Etats signataires sont résolus à assurer à tous le plein et égal accès à l’éducation, la libre poursuite de la vérité objective et le libre échange des idées et des connaissances ».
Des nombreux textes normatifs réaffirment le droit à l’éducation. On recense parmi ces textes deux catégories. La première étant consacrée aux grands textes solennels comme les conventions, les traités proclamant les droits fondamentaux. Ils ont été adoptés dans un cadre interétatique,  ou bien dans le cadre des Nations Unies. L’un des textes les plus emblématiques est la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée par son Assemblée Générale en 1948 et dont l’article 26 consacre le droit à l’éducation. Il est le premier document juridique protégeant les Droits de l’Homme de façon universelle et constitue avec le Pacte International relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, ce qu’on appelle la Charte internationale des droits de l’homme.
Au niveau européen, le Conseil de l’Europe accorde une attention particulière à la protection des droits de l’enfant à travers l’adoption de la Convention européenne sur l’exercice des droits de l’enfant en 1996.
Plus spécifiquement, la communauté internationale prend conscience de l’importance de la protection des Droits de l’enfant en adoptant en 1924 la Convention de Genève.  Cette première étape amorce le début d’une réelle mobilisation et se poursuit sous l’impulsion de l’ONU avec l’adoption de la Déclaration des droits de l’enfant en 1959, puis de la Convention Internationale des  Droits de l’enfant (CIDE) en 1989. Cette convention comporte 54 articles et est ratifiée par 191 pays membres de l’ONU. Un Comité indépendant veille à son respect et à son application.
En France, les lois de Jules Ferry de 1881 et 1882 rendent obligatoire un enseignement primaire laïque et gratuit pour les filles et les garçons entre 6 et 13 ans. Il a pourtant fallu attendre jusqu’en 1946 pour que le droit à l’éducation trouve sa place dans le préambule de la Constitution de la Ve République. la loi du 23 avril 2005 dite « loi de l’orientation et de programme » vient renforcer le droit à l’éducation en interdisant les parents d’un mineur non émancipé, de s’opposer à la poursuite de ses études au-delà de 16 ans.
A ces textes normatifs s’ajoutent les nombreuses conférences, évènements et actions en faveur des droits de l’enfant. L’ONU a par ailleurs recommandé à tous les pays membres d’instituer annuellement une journée mondiale de l’enfance, le 20 novembre, jour de l’adoption de la CIDE.
Parmi les nombreuses initiatives entreprises par les citoyens du monde, le destin hors norme de Malala symbolise le courage des militants.  Il constitue un message d’espoir dans la lutte en faveur de l’éducation pour les générations actuelles et futures.

 

MALALA YOUSAFZAI  (1997 –     ) – l’éducation des filles au Pakistan

 

Malala Yousafzai, née en 1997 est une jeune pakistanaise connue pour son  implication sans faille en faveur de l’éduction des enfants. Elle devient la plus jeune Lauréate de l’histoire du prix Nobel de la paix, après sa consécration par le comité d’Oslo en 2014.
La jeune femme grandit dans la ville de Mingora, située dans la vallée du Swat au nord-ouest du Pakistan et voit sa vie basculer le 9 octobre 2012.  Alors que Malala rentrait d’une journée d’école, elle est victime d’une tentative d’assassinat des Talibans pakistanais pour le simple fait d’avoir étudié.
En 2003, l’arrivée des Talibans dans la région, changea radicalement la vie des habitants. Dès l’âge de onze ans, Malala prend position dans un discours contre l’oppression des extrémistes dans l’éducation des filles. En 2008, et sous le pseudonyme de Gul Makai, elle témoigne sur son blog de la situation critique des habitants de la vallée, soumis à la terreur des Talibans.[1] Loin d’être un cas isolé, Malala doit alors braver quotidiennement l’interdiction de se rendre à l’école publique fondée par son propre père. Si l’accès à l’éducation est un droit en Occident, il est un combat de tous les jours pour les jeunes filles pakistanaises.
L’implication de Malala dans cette cause fait partie de l’héritage transmis par sa famille, et en particulier par son père Ziauddin Yousafzai. Plus jeune, il refuse de se voir imposer une éducation par l’école coranique, et fonde la Khushal Public School, une école pour les filles. Il s’oppose publiquement à l’implantation des Talibans dans la région du Swat et se révolte face l’inertie du gouvernement.[2] Il devient ainsi un ennemi déclaré des Talibans qui le menacent de mort. C’est dans ce contexte qu’il encourage sa fille Malala à répondre à la demande de la BBC qui recherche des témoignages d’enfants sur les conditions de vie sous le régime des Talibans.[3] L’identité de Malala ne tarde pas à être découverte et la jeune fille doit elle aussi faire face à de nombreuses menaces de mort. Ces intimidations ne l’empêchent pas de créer un forum public sur lequel elle revendique son droit à l’éducation, et plus généralement à l’éducation des filles. En 2011, son travail et son courage sont récompensés par le prix international de la Paix pour les enfants.
Un an plus tard, elle est touchée en pleine tête par une balle tirée par un Taliban alors qu’elle rentrait de l’école. Entre la vie et la mort, elle est transférée dans un hôpital militaire en Angleterre où elle restera sept jours dans le coma.
Malala vit aujourd’hui avec sa famille à Birmingham et continue de militer. Malgré un emploi du temps chargé, elle tient à poursuivre ses études qu’elle réussit brillamment. Elle reste sous la menace des islamistes, mais s’est promise de retourner un jour dans son pays  pour réaliser son rêve : devenir la deuxième femme Premier Ministre, après Benazir Bhutto.
Elle publie notamment en 2013 un livre « Moi Malala, je lutte pour l’éducation et je résiste aux talibans » dans lequel elle raconte son combat contre l’obscurantisme, et fonde en 2014 la « Malala Fund» afin de récolter des fonds et aider les jeunes filles à accéder à l’éduction. L’action de sa fondation a pour but de rassembler et d’élever en une unique voix, celle de nombreuses jeunes filles qui partagent le même combat, autour d’une plateforme. Un autre aspect important de la fondation, est celui de l’assistance juridique apportée aux jeunes filles qui se voient privées d’éducation.[4]
A ce jour, la fondation a récolté 3.5 millions de dollars auprès de 78 pays. Ces fonds ont permis d’aider 6 pays dans l’accès à l’éducation des filles : le Pakistan, le Nigeria, le Kenya, la Sierra Leone, la Jordanie ainsi que le Liban. L’action de la fondation au Pakistan a contribué une hausse de la fréquentation des écoles par les filles, ainsi que l’achat de fournitures, de livres et d’uniformes. Les crises politiques et sanitaires auxquelles certains pays doivent faire face ont amené la fondation à réfléchir sur la mise en place d’établissements d’éducation alternatifs.[5] Les familles de réfugiés en Syrie et au Liban, peuvent par exemple accompagner les jeunes filles dans des structures informelles, et dans des locaux ouverts spécialement à cet effet. En Sierra Leone, les jeunes peuvent suivre les cours grâce au programme diffusé par radio.
Cependant, l’un des revers des actions menées par la fondation est la hausse des menaces proférées à l’encontre les jeunes filles qui se rendent à l’école, notamment au Nigéria[6]. Il relève donc de la responsabilité des Organisations et Gouvernements de renforcer la protection et de la sécurité de ces jeunes.

 

Contexte géographique :

Deuxième pays musulman au monde, le Pakistan est un pays d’environ 190 millions d’habitants. Malgré une légère hausse aux dernières élections législatives en 2013, la population pakistanaise rejette dans l’ensemble les idées extrémistes des islamistes. Ils récoltent en effet moins de 4 % mais forment tout de même une coalition avec le gouvernement actuel, la Ligue Musulmane du Pakistan, parti conservateur libéral. Le pouvoir judiciaire est très fort au Pakistan, et représente un rempart face aux extrémistes. Il existe cependant des régions dans lesquelles le gouvernement peine encore à assurer la sécurité.
La Vallée de Swat, région du Sud-Ouest du Pakistan est une région particulièrement sensible. En 2003 elle est envahie par les activistes Talibans dirigés par le chef religieux Maulana Fazalullah qui imposent la Charia. La première offensive de l’armée pakistanaise en 2007 pour neutraliser les Talibans reste vaine, et ce n’est qu’en 2009 que le District est libéré de cette emprise extrémiste. L’implantation des Talibans a eu des conséquences dramatiques sur l’économie et la vie quotidienne des habitants. Pour assoir leur autorité, ils tentent d’effacer l’Histoire en détruisant les monuments historiques de la ville comme le Bouddha de Jihan Abada, les bâtiments gouvernementaux, ainsi que les écoles publiques. Ils censurent toute forme de culture en interdisant la musique, la radio et la télévision. L’oppression envers les femmes se fait de plus en plus forte puisqu’elles sont privées d’éducation.
L’évènement tragique dont a été victime Malala démontre la réalité désastreuse qui subsiste dans certaines régions du monde. Il propulse à la lumière médiatique le combat de nombreux militants contre les violations du droit fondamental de l’accès à l’éducation et à l’égalité entre les sexes. Le mariage forcé, les grossesses précoces, et les violences subies par les femmes, sont autant de freins à ce droit. L’éducation est pourtant un puissant facteur d’égalité dans ces pays, et est également un moyen de lutte contre la pauvreté, et l’instabilité socio-politique.

 

Six ans après le départ des Talibans, la situation au Pakistan a-t-elle évolué ?
La Vallée du Swat reste influencée par les idées extrémistes, en particulier dans les régions rurales. L’histoire Malala et le combat qu’elle mène ont certes eu une résonnance internationale, mais l’impact n’est pas aussi positif dans son pays. Acclamée par les politiques et personnalités occidentales, son action divise au sein même du Pakistan. Elle est accusée d’avoir été instrumentalisée par les occidentaux, en particulier par les forces américaines dans une lutte contre l’Islam et contre le Pakistan  nucléaire. Ce sont en tout cas les accusations portées par Sami ul-Haq, le chef du parti Jamiat Ulema-e-Islami, considéré comme le « père des Talibans ».  A ces attaques, Malala répondra avec détermination lors de son intervention du 12 juillet 2013 devant l’Assemblée générale de l’ONU, « Je veux l’éducation pour les fils et les filles des talibans et tous les extrémistes et les terroristes. »
Par ailleurs, en juin 2015, la presse Britannique révèle que le jugement rendu par la justice pakistanaise avait en réalité acquitté huit des dix pro-activistes condamnés à la prison à vie pour l’agression de Malala.[7] L’attitude du gouvernement pakistanais dans sa lutte contre les extrémistes a toujours été qualifiée d’ambiguë par les Occidentaux. L’histoire de ce pays est en effet liée à celle des talibans qu’il a aidés dans la prise de pouvoir de Kaboul en 1996, et qui a servi de terre d’accueil après 2001. L’attaque, le 16 avril 2014, d’une école d’enfants de militaires de Peshawar montre que le fléau du terrorisme dans ce pays est toujours bien présent. Dans cet assaut d’une rare violence, on dénombre 141 morts dont 132 écoliers. Le choix du lieu de l’attentat n’est pas anodin. Le groupe terroriste s’attaque avant tout à l’institution, comme cela avait déjà été le cas en tirant sur Malala qui portait son uniforme d’écolière. Le Gouvernement de la province de Khyber Pakhtunkhwa a décidé de riposter en rétablissant la peine de mort dans le cas du terrorisme et en fournissant aux professeurs des armes à feu. Faces aux critiques contre cette mesure radicale, le Gouvernement est revenu sur sa décision tout en maintenant l’entrainement de tirs des professeurs. Cet évènement est l’un des pires attentats vécu par le pays, et ravivent les critiques à l’encontre des services secrets Pakistanais qui se félicitaient pourtant de leur efficacité. L’attentat met en exergue les difficultés du Gouvernement Pakistanais à lutter contre le terrorisme. Alors que certains justifient cette faille par un manque de moyens, d’autres soulignent le manque de volonté du Gouvernement Pakistanais.
Les accusations proviennent également du Gouvernement Afghan. Selon lui, le Pakistan ne prend pas de mesures suffisantes pour éliminer les repaires terroristes et jouerait un double jeu. Il saperait d’autre part les efforts mis en place par l’armée Américaine pour éradiquer les extrémistes en dénonçant les drones Américains chargés de bombarder les milices des Talibans à la frontière Afghane.
Lors de sa récente prise de parole à l’Assemblée Générale de l’ONU du 1e octobre 2015, la Ministre des affaires étrangères de l’Inde s’insurge également contre le comportement du Gouvernement Pakistanais. Les relations entre le Pakistan et l’Inde ont toujours été sensibles, et en particulier sur les questions de sécurité. L’attaque de novembre 2008 à Bombay en est une illustration. Malgré les promesses du Pakistan, les auteurs de l’attentat n’ont toujours pas été arrêtés. Mme Swaraj ajoute qu’« aucun d’entre nous ne peut accepter le terrorisme comme instrument de gouvernement légitime ». Elle demande au Pakistan de clarifier sa position dans la lutte contre le terrorisme et en fait une condition préalable à toute négociation sur la région du Cachemire.
Le combat mené par la fondation Malala fait écho à celui de nombreuses organisations présentes à l’échelle internationale. L’engagement en faveur de ce droit touche toutes les générations. A l’instar de Malala, Carl Kielburger a par exemple, alors tout juste âgé de douze ans, fondé l’organisme de bienfaisance « Free the Children » en 1995. Aidé de son frère Marc, et de douze autres enfants, l’organisme a pour but de défendre les droits des enfants. Il organise annuellement l’évènement « We day ». Ce concours permet de s’engager localement à travers une action concrète en faveur de l’éducation et est organisé dans le cadre du programme « We school ». Les meilleures idées et initiatives sont ensuite récompensées par un prix au cours d’une cérémonie.
Il existe d’autres organismes comme la Campagne Mondiale pour l’Education (CME) qui se définit comme étant « le plus grand mouvement de la société civile du monde du travail pour réaliser le droit à l’éducation pour tous ». En 2005, le Pakistan devient membre de la CME et fonde la Coalition Pakistanaise pour l’éducation afin de répondre aux problématiques propres au Pakistan. Elle fournit une aide et des conseils juridiques pour connaitre ses droits en matière d’éducation. Elle mobilise également des fonds pour la construction d’écoles, l’achat de fournitures et d’uniformes. Le travail de la Coalition est soutenu par le Gouvernement Pakistanais, et en particulier par les Ministères en charge de l’éducation.
Au-delà des promesses et de la mobilisation internationale, les résultats sont-ils à la hauteur des attentes en matière d’accès à l’éducation ?

 

L’entrée dans la nouvelle ère a été l’occasion de faire le point et de dresser les nouveaux défis en matière de Droits de l’Homme. Le Sommet du Millénaire tenu en septembre 2000 par l’Assemblée Générale de l’ONU a permis de mettre en avant les objectifs à atteindre pour 2015. Le Secrétaire Général de l’époque, Kofi Annan, a appelé les cent quatre-vingt-onze Etats-Membres à mener à bien leur mission concernant la pauvreté, le sida, l’éducation et l’environnement. Le Sommet s’est achevé par l’adoption de la Déclaration du Millénaire, énonçant les huit objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)
L’Objectif 2  (OMD 2) s’intitule « assurer l’éducation primaire pour tous ».  Dans son rapport de 2000, M. Annan reconnait que l’accès universel à l’instruction primaire n’est possible qu’en faisant de l’égalité des sexes une priorité. Ainsi, il avait appelé les « participants au Sommet du Millénaire à s’attacher à réaliser l’objectif consistant à réduire sensiblement, d’ici à 2005, l’écart entre les garçons et les filles au niveau primaire et secondaire, de sorte que, d’ici à 2015, tous les enfants achèvent l’école primaire. »
L’année 2015 a donc marqué la fin d’un premier cycle et, à l’heure du bilan, l’ONU publie un rapport précis sur les évolutions depuis le Sommet du Millénaire.
La situation mondiale en matière d’éducation s’est globalement améliorée. Le taux de scolarisation dans l’enseignement a nettement progressé passant de 83 % en 2000 à 91 % en 2015. L’écart entre les inégalités filles-garçons s’est sensiblement réduit et le taux d’alphabétisation entre 1990 et 2015 est passé de 81% à 93 %.
L’Objectif Millénaire 2 fixé lors du Sommet en 2000 n’est pourtant pas atteint.
En effet, cent-vingt-sept millions d’enfants et d’adolescents dans le monde n’ont pas accès à l’école, et pas moins de cinquante-huit millions d’enfants en âge d’aller à l’école primaire en sont privés. Le constat d’une nette progression entre 2000 et 2008 portant le nombre d’enfants n’allant pas à l’école de cent-deux millions à soixante millions a rapidement fait place à une chute puis une stagnation des chiffres par la suite. Aujourd’hui, près d’un enfant sur dix ne va pas à l’école. Parmi eux, les filles sont particulièrement victimes de cette exclusion. Au Pakistan, 40 % des filles ne sont pas scolarisées contre 33 % des garçons en âge de l’être. Les faits montrent pourtant que l’éducation des filles et les moyens investis dans leur instruction ont un impact direct sur la société et l’économie d’un pays. Les progrès sont nombreux en matière de santé, de nutrition, de ralentissement du taux de fécondité et une baisse de la pauvreté. Cet écart se creuse d’autant plus en fonction du milieu dont est issu l’enfant. Ainsi 44 % des enfants qui ont grandi dans la classe rurale sont privés d’éducation ; ils représentent 25 % des enfants en milieu urbain.
Le chemin vers l’égalité est encore long. Il existe de fortes disparités entre secteur rural et secteur urbain, selon l’origine ethnique et en fonction des sexes.  Les filles qui vont à l’école sont soumises aux pressions de leurs professeurs et doivent quitter l’école d’elles-mêmes. En 2011 au Pakistan, trois filles sur cinq achèvent leur éducation au niveau primaire. Le journaliste pakistanais Aamir Latif publiait en 2014 un article pour l’UNESCO dans lequel il relate les témoignages des jeunes Pakistanais au quotidien dans le système éducatif. Il révèle notamment que les actes du Gouvernement Pakistanais ne sont pas à la hauteur de ses promesses, et parle même d’une situation alarmante en milieu rural. Dans certaines tribus, une interprétation erronée de la religion constitue un véritable obstacle dans l’éducation des jeunes filles. Aucune mesure n’a réellement été prise par le Gouvernement pour apporter son aide aux ONG ni aux groupes locaux dans la mise en place d’infrastructures.
De nombreux progrès ont été faits mais la situation actuelle prouve que les efforts fournis doivent s’intensifier sans perdre de vue l’objectif initial, celui d’une éducation universelle et de qualité. En s’appuyant sur les chiffres fournis par les Organisations comme celle de l’UNESCO, chaque gouvernement peut identifier quels sont les besoins concrets et les moyens qui doivent être mis en place pour permettre la scolarisation de tous les enfants. En raison de la forte croissance démographique, on estime d’ici à 2030 une demande vingt-sept millions d’enseignants qualifiés dans le monde.
Il est nécessaire de sensibiliser davantage les populations sur l’importance de l’éducation dans les endroits les plus reculés, où la culture et la religion sont de véritables obstacles. Il faut par ailleurs intensifier les efforts pour faire disparaitre les inégalités en insistant sur l’éducation des filles, comme facteur de progrès social et de lutte contre la pauvreté. L’égalité des sexes ne pourra être obtenue qu’en passant par l’éducation.
Les obstacles sociaux-culturels ne sont pas les seuls obstacles puisque la situation politique sensible dans certains pays privent les enfants d’établissement scolaire. C’est la raison pour laquelle les centres et infrastructures doivent être multipliés dans les zones géographiques reculées ou bien victimes de guerre et de conflits civils. Des modes alternatifs d’enseignement doivent être par ailleurs développés.
Les actions en faveur de la santé et de la nutrition ont également un impact sur l’accès à l’éducation. De nombreuses études ont démontré le lien de causalité entre l’état de santé d’un enfant, et sa capacité à apprendre. Un enfant en bonne santé aura d’autant plus de facilité à se rendre à l’école et à apprendre efficacement. La mauvaise santé des enfants est à la fois une cause et un effet de la pauvreté.
Afin de poursuivre les efforts, les Etats-Membres ont pris de nouveaux engagements et ont défini un programme de développement pour l’après 2015. Dix-sept objectifs sont été énoncés, et sont le fruit d’une étroite collaboration entre les dirigeants des pays et la société civile. Le quatrième objectif se focalise sur l’éducation et a pour but « d’assurer l’accès à tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ».
De belles promesses que les pays devront tenir d’ici à 2030.

 


[1] http://www.bbc.com/news/world-asia-23241937
[2] https://www.malala.org/malalas-story
[3] http://www.biography.com/people/malala-yousafzai-21362253
[4] https://www.malala.org/about
[5] https://www.malala.org/programmes
[6] http://blog.malala.org/post/121689742472/northern-nigerian-girls-tell-their-abducted-chibok
[7] http://www.bbc.com/news/world-asia-33018334

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